Marchés publics et droit des assurances : Lorsque l’assureur notifie une décision de résilier le contrat d’assurance avant le terme du marché public, l’acheteur est en droit de saisir le juge des référés sur le fondement de l’article L. 521-3 du CJA (référé mesures utiles) tendant à ce qu’il ordonne la poursuite du marché pendant la durée strictement nécessaire au déroulement de la procédure de passation d’un nouveau marché, sans que la durée ne puisse excéder 12 mois.
« 2. S’il n’appartient pas au juge administratif d’intervenir dans l’exécution d’un marché public en adressant des injonctions à ceux qui ont contracté avec l’administration, lorsque celle-ci dispose à l’égard de ces derniers des pouvoirs nécessaires pour assurer l’exécution du contrat, il en va autrement quand l’administration ne peut user de moyens de contrainte à l’encontre de son cocontractant qu’en vertu d’une décision juridictionnelle. En pareille hypothèse, le juge du contrat est en droit de prononcer, à l’encontre du cocontractant, une condamnation, éventuellement sous astreinte, à une obligation de faire. En cas d’urgence, le juge des référés peut, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-3 du code de justice administrative, ordonner au cocontractant, éventuellement sous astreinte, de prendre à titre provisoire toute mesure nécessaire pour assurer la continuité du service public ou son bon fonctionnement, à condition que cette mesure soit utile, justifiée par l’urgence, ne fasse obstacle à l’exécution d’aucune décision administrative et ne se heurte à aucune contestation sérieuse. » (CE, 7-2 chr, 12 juill. 2023, n° 469319, Lebon T.)
Le remboursement de l’avance forfaitaire du sous-traitant en cas de résiliation du marché public : le maître d’ouvrage peut émettre un titre exécutoire à l’encontre d’un sous-traitant pour recouvrer les sommes versées dans le cadre d’avances, lorsque les prestations n’ont pas été effectivement réalisées et en l’absence d’établissement d’un décompte général et définitif.
« 6. (…) Il résulte de la combinaison de ces dispositions que lorsque le marché est résilié avant que l’avance puisse être remboursée par précompte sur les prestations dues, le maître d’ouvrage peut obtenir le remboursement de l’avance versée au titulaire du marché ou à son sous-traitant sous réserve des dépenses qu’ils ont exposées et qui correspondent à des prestations prévues au marché et effectivement réalisées. S’agissant des prestations réalisées par le sous-traitant, il appartient au maître d’ouvrage de consulter le titulaire du marché pour s’assurer que ces conditions remplies. En cas de résiliation pour faute du marché, le remboursement de l’avance par le sous-traitant ne fait pas obstacle à ce que celui-ci engage une action contre le titulaire du marché et lui demande, le cas échéant, réparation du préjudice que cette résiliation lui a causé à raison des dépenses engagées en vue de l’exécution de prestations prévues initialement au marché. »
7. Lorsque le contrat prévoit l’établissement d’un décompte général et définitif, retraçant l’ensemble des opérations auxquelles donne lieu l’exécution du marché, la créance détenue par le maître de l’ouvrage sur le titulaire de celui-ci ne saurait présenter un caractère certain et exigible et, par suite, faire l’objet d’un titre exécutoire en l’absence d’un tel décompte, même dans l’hypothèse d’une résiliation du marché. En revanche, ni les dispositions mentionnées aux points 2 à 5, ni aucun autre texte, ni aucun principe ne subordonne à l’établissement préalable d’un tel décompte l’exigibilité de la créance que détient le maître d’ouvrage sur le sous-traitant, notamment pour le remboursement des avances qu’il a versées à ce dernier. » (CE, 7-2 chr, 1er juin 2023, n° 462211, Lebon T)
Référé expertise et contentieux de l’exécution d’un marché public : il est possible d’introduire un référé expertise lorsqu’une requête au fond est en cours d’instruction, toutefois, il appartient au juge des référés d’apprécier l’utilité de la mesure demandée.
« 6. L’utilité d’une mesure d’instruction ou d’expertise qu’il est demandé au juge des référés d’ordonner sur le fondement de l’article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d’une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d’autres moyens et, d’autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l’intérêt que la mesure présente dans la perspective d’un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. S’il résulte de l’article R. 625-1 du code de justice administrative qu’il peut être fait application des dispositions de l’article R. 532-1, alors même qu’une requête au fond est en cours d’instruction, il appartient au juge des référés d’apprécier l’utilité de la mesure demandée sur ce fondement (cf. CE, 27.11.2014, n° 385843 et 385844). »
7. « (…) Ces seules circonstances ne sont toutefois pas de nature à conférer à la mesure d’expertise qu’il est ainsi demandé au juge des référés d’ordonner un caractère d’utilité différent de celui de la mesure que le juge saisi de cette requête, pourra décider, le cas échéant, dans l’exercice de ses pouvoirs de direction de l’instruction. » (CAA Marseille, 17 avr. 2023, n° 23MA00834, Inédit au Recueil Lebon).
Demande de suspension de l’exécution d’un marché relatif à l’incinération de déchets par un Préfet : la présence d’erreurs grossières sur l’estimation du marché dans l’avis public d’appel à la concurrence ou dans les documents de la consultation ne crée pas un doute sérieux sur la validité du contrat (CAA Nancy, 24 avr. 2023, n° 23NC00843).
Attention aux délais de contestation d’un décompte général : Par un arrêt du 27 juin 2023, le juge des référés accorde une provision à une commune ayant établi un décompte général faisant ressortir un solde de 1.613.174,73 euros TTC en sa faveur et non régulièrement contesté par l’attributaire.
« 6. D’une part, par un arrêt n° 21NC02958 du 16 juin 2022, devenu définitif, la cour a estimé que la transmission par la société Soludec de son projet de décompte final était prématurée puisqu’opérée à une date à laquelle la réception n’était pas encore intervenue, de même qu’était prématuré l’envoi le 27 janvier 2015 à la commune de Metz de la mise en demeure d’établir le décompte. La cour a, en conséquence, considéré que la demande présentée par la société Soludec devant le tribunal administratif était irrecevable et l’a rejetée. (…)
8. Il résulte de l’instruction que la commune de Metz a établi un décompte général le 15 septembre 2015, reçu le 8 octobre 2015 par la société Soludec. Ce décompte général fait ressortir un solde de 1 613 174,73 euros TTC en sa faveur. En l’absence de réclamation régulièrement formée par la société Soludec, ce décompte général est devenu définitif, et compte tenu du rejet de la contestation opposée par la société Soludec devant le tribunal administratif, la cour administrative d’appel et le Conseil d’Etat, la créance de la commune de Metz apparaît comme non sérieusement contestable dans son principe au sens des dispositions citées au point 4. » (CAA Nancy, 27 juin 2023, n° 22NC00963, Inédit).
AB.
